Délais de reprise des impôts commerciaux (1/3)
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Propos introductifs
Il n'existe pas de délai unique de prescription en matière fiscale. Cependant, dans tous les cas où la loi n'a pas expressément fixé de délai plus court ou plus long, le délai de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l'impôt (art. L186 du LPF).
Ce délai ordinaire de droit commun de reprise trouve en pratique peu d'occasion de s'appliquer car il est prévu des délais de reprise propres à chaque type d'imposition d’une durée abrégée. Il s’agit de délais ordinaires abrégés de reprise (I), à ne pas confondre avec les délais spéciaux (II) qui pourront, le cas échéant, déroger aux délais ordinaires au profit d’une période plus longue. Notons qu'il existe également des cas où le délai ordinaire de reprise pourra être prorogé (III).
Mais il convient de rappeler préalablement certaines particularités des règles de computation des délais de reprise de l’administration fiscale.
A cet égard, le principe en la matière veut qu'aucun allongement des délais de reprise ne vienne remettre en cause des prescriptions déjà acquises lors de son entrée en vigueur.
Ainsi, dans le cadre d’une réforme allongeant un délai de reprise, si un délai est prescrit avant l’entrée en vigueur de la réforme, la prescription acquise sous l’empire de l’ancienne législation n’est pas remise en cause rétroactivement. En revanche, le nouveau délai allongera d’autant les années non prescrites.
Exemple : Pour un délai de reprise de trois ans avant l’entrée en vigueur d’une réforme (1er janvier 2015) portant ce délai à 6 ans, il ne sera pas possible de rouvrir la prescription acquise au 1er janvier 2015, c’est-à-dire, celle applicable à des revenus perçus en 2010 (imposition due en 2011). Ainsi, la prolongation de la prescription s’appliquera aux revenus perçus en 2011 (imposition due en 2012) et pour les années suivantes.
I.Les délais ordinaires abrégés de reprise
Catégorie d'impôt | Délai de prescription abrégé | Textes de référence |
Impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placement (CSG, CRDS, prélèvement social de 2% et contributions additionnelles au prélèvement social) | Le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due | Art. 169 al.1er et 169 A du LPF |
Impôt sur les sociétés (art. 205 et s. du CGI) et la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés (art. 235 ter ZC du CGI) | ||
Taxe sur les salaires (art. 231 et s. du CGI) | ||
Cotisation de 2% perçue dans le cadre de la participation des employeurs à l'effort de construction (art. 235 bis du CGI) | ||
Contribution annuelle sur les revenus locatifs (art. 234 nonies du CGI) | ||
cotisation foncière des entreprises (CFE) | Le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due | Art. 174 al.1er du LPF |
cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) | ||
Taxes sur le chiffre d'affaires : - TVA (y compris la TVA immobilière) - taxe d'apprentissage (art. 1678 quinquies, I du CGI) - participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue (art. 235 ter C du CGI) | Le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du CGI Notons que l'administration ne peut se voir opposer la prescription pour vérifier et rectifier le montant de taxes déductibles, trouvant son origine dans une période prescrite, mais dont le bénéfice est reporté sur des droits dus au cours d'une période non prescrite (art. 177 al.1er du LPF, CE, 6 mars 1981, n° 19337). | Art. L172 A et L176 al.1er du LPF |
Prescription des pénalités fiscales | ||
Champ d'application | Délai | Textes de référence |
Amende fiscales concernant l'assiette et le paiement des droits, taxes, redevances et autres impositions | Les amendes fiscales se prescrivent dans le même délai et dans les mêmes conditions que les droits simples et majorations auxquels elles se rapportent | Art. L188 al.1er du LPF |
Amendes fiscales prononcées par la juridiction pénale | Les amendes et confiscations fiscales se prescrivent dans le même délai que pour les peines correctionnelles de droit commun et dans les mêmes conditions que pour les dommages-intérêts. Il s'agit donc d'un délai de six années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive (art. 133-3 du Code pénal). Il s'agit de prescription de la peine et non pas de prescription de l'action, laquelle est régie en matière délictuelle par l'article 8 du CPP. | Art. L188 al.3 du LPF |
Particularités concernant l’impôt sur le revenu des personnes physiques exerçant une activité professionnelle.
• Incidences des dates de clôture des exercices sociaux sur les délais de reprise
En pratique, lorsque les particuliers exercent des activités professionnelles imposables à l’impôt sur le revenu, la loi institue un principe de liberté quant à la détermination de la date de l’exercice social d’une entreprise. Les dates de clôture des exercices sociaux ne correspondent pas toujours à l’année civile. La pratique a donc des incidences sur la mise en œuvre du délai de reprise.
La doctrine administrative[1], faisant application des articles 37 du CGI et L169 du LPF, admet que lorsqu’aucun exercice n’est clos dans l’année civile, il est nécessaire d’établir une imposition sur les bénéfices de la période écoulée, depuis la dernière période imposée jusqu’au 31 décembre de l’année.
En outre, lorsqu’un exercice comptable comprend deux périodes d’imposition correspondant à deux années différentes, alors le délai de reprise s’apprécie séparément pour chacune de ces périodes.
Exemple : une entreprise nouvelle créée le 1er octobre N décide d’arrêter son premier résultat au 31 décembre N+1. Les résultats de la période 1/10/N à 31/12/N ne pourront plus être redressés après le 31/12/N+3.
De même, si une entreprise dont l’exercice coïncidait avec l’année civile décide de clôturer plus tard (en mars de N+1), alors les résultats de l’année N ne pourront pas être corrigés au-delà du 31 décembre N+3.
• Délai de reprise et droit de vérification de l’administration
Enfin, l’expiration des délais de reprise ne fait pas obstacle à l’exercice du droit de vérification de l’administration à l’égard des périodes prescrites mais dont les opérations ont des incidences sur les résultats d’une période ultérieure, non couverte par la prescription[2]. Cette règle s’applique notamment aux déficits antérieurs reportables[3], aux emprunts afférents à une année prescrite[4], aux amortissements pratiqués au cours d’exercices prescrits[5] et au contrôle de la valeur d’inscription d’un élément d’actif au bilan.
[1] BOI-CF-PGR-10-20-20151007 §30.
[2] Documentation pratique Fiscale Lefebvre, CF II, 1085s.
[3] CE 27 février 1970 n° 76494, 8e et 9e s-s, Dupont 1970 et D. adm. 13 L-1212 n°34, 1er juillet 2002.
[4] CAA Nancy 22 mai 1990 n°430, 2ème chambre Holzhammer (RJF 10/90 n°1243).
[5] CE, 23 août 2006 n°264228, 10e et 9e s-s, SAS Financière Aubin.