Droit décrypté
Le droit de la société mère à superviser l'activité de ses filiales
28 Avril 2014 Droit des Affaires
Le droit de la société mère à superviser l'activité de ses filiales
Dans un arrêt du 19 novembre 2013, la chambre commerciale de la Cour de cassation s'est prononcée sur la question de la responsabilité des sociétés mères en cas d'une filiale endettée et soumise à une procédure de liquidation judiciaire. En d'autres termes, peut-on étendre la procédure collective à la société mère et l'obliger de répondre des dettes de sa filiale sur le seul fondement que la société mère exerce un contrôle sur l'ensemble de ses filiales ?
I) La responsabilité de la société mère et l'argument de direction de fait
L'objectif des requérants étaient d'obtenir l'extension de la procédure collective de la filiale à la société mère en tant que dirigeant de fait, qui exercent un contrôle effectif et définissent les orientations de la société.
En l'espèce, la filiale de la société M. ne disposait d'aucune autonomie décisionnelle, et c'est la société mère qui s'était chargée de sa gestion. Néanmoins la Cour de cassation a refusé de conclure à une direction de fait. Par conséquent, la responsabilité de la société mère n'a pas été retenue par la chambre commerciale.
Cette décision se comprend par la volonté de ne pas décourager l'investissement et la constitution de groupe de sociétés en France. Cependant, elle a pour conséquence de diluer les responsabilités des sociétés mères ce qui peut mettre à mal le gage des créanciers et va à l'encontre de la jurisprudence antérieure.
II) La responsabilité de la société mère et l'argument de la chose jugée
On notera concernant la procédure, que l'existence d'une instance préalable devant la chambre sociale de la Cour de cassation n'a pas empêché la saisine de la chambre commerciale.
Avant que la chambre commerciale de la Cour de cassation ne se prononce sur la responsabilité de la société mère dans l'insuffisance d'actif de sa filiale, la chambre sociale de la Cour de cassation (voir l'arrêt) a jugé que la société mère peut être assignée en comblement du passif de sa filiale, lorsqu'elle intervient dans ses affaires et détient à son égard un pouvoir de contrôle. Par conséquent, elle a prononcé sa condamnation en tant que co-employeur des salariés de sa filiale.
Mais la décision de la chambre sociale qui qualifie la société mère de co-employeur des salariés de sa filiale, n'a pas d'autorité de la chose jugée au titre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif. C'est la raison pour laquelle la chambre commerciale de la Cour en rejet l'argument de la chose jugée invoqué par les liquidateurs judiciaires a disposé définitivement en faveur de l'irresponsabilité de la société M. pour les dettes de sa filiale.