Droit décrypté
La Loi Warsmann II simplifie la gouvernance et les opérations sur le capital des sociétés
28 Juin 2012 Droit des Affaires
La Loi Warsmann II simplifie la gouvernance et les opérations sur le capital des sociétés
La loi Warsmann II de simplification du droit et d’allègement des démarches administratives (loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, JO du 23 mars 2012) opère diverses modifications en matière de droit des sociétés.
I- Gouvernance des sociétés
1) Statut des administrateurs et membres du conseil de surveillance des SA
Durée du mandat social
Désormais la durée des administrateurs et des membres du conseil de surveillance est déterminée par les statuts sans pouvoir excéder six ans. Antérieurement, la durée de leurs fonctions était déterminée par les statuts sans pouvoir excéder six ans en cas de nomination par les assemblées générales et trois ans en cas de nomination dans les statuts.
Cumul des mandats d’administrateur et de salarié
La seconde modification concerne le cumul des mandats d’administrateur et de salarié. Le principe en vigueur jusqu’ici était qu’un administrateur en fonction ne pouvait se faire consentir un contrat de travail. A présent, le cumul des mandats peut intervenir pour les PME sous deux conditions : le contrat de travail doit correspondre à un emploi effectif, ensuite, la société concernée ne doit pas dépasser à la clôture d’un exercice les seuils définissant les PME (un total de bilan inférieur à 43 millions d’Euros, un montant hors taxe de chiffre d’affaire n’excédant pas 50 millions d’Euros, un effectif inférieur à 250 salariés.)
2) Modification du régime d’attribution des actions gratuites
Accroissement de la liberté d’attribution des actions gratuites
Jusqu’à présent, le nombre total des actions attribuées gratuitement ne pouvaient excéder 10% du capital social à la date de la décision de leur attribution par le conseil d’administration ou le directoire. Ce chiffre est désormais porté à 15% sous deux conditions :
- les titres de la société ne doivent pas être admis sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation,
- la société ne doit pas dépasser à la clôture d’un exercice social les seuils susvisés au 1 définissant les PME.
3) Régime des assemblées générales
Règles visant la convocation de l’assemblée des SARL et des SA
La loi prévoit un nouveau mode de convocation des associés pour statuer sur les comptes annuels dans les six mois de la clôture de l’exercice, en cas de carence de l’organe compétent pour les SARL et les SA, par le ministère public ou par toute personne intéressée (SARL), par tout actionnaire (SA) pour saisir le tribunal compétent statuant en référé afin d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, les dirigeants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder.
En ce qui concerne les SARL, se trouve ensuite modifié l’article L.223-27 du Code de commerce qui disposait qu’un ou plusieurs associés détenant la moitié des parts sociales ou le quart des parts sociales, s’ils représentent dans ce dernier cas, au moins le quart des associés, peuvent demander la réunion d’une assemblée. La référence au quart est remplacée chaque fois par la référence au dixième des parts sociales et des associés.
Une logique différente préside au réaménagement de l’article L225-103 du même Code, pour la réunion des assemblées spéciales dans les SA. Le IV de cet article disposait que « les actionnaires agissant en désignation d’un mandataire de justice doivent réunir au moins le dixième des actions de la catégorie intéressée ». C’est désormais seulement le vingtième des actions de la catégorie intéressée qu’il est nécessaire de réunir.
Règles de vote
Deux nouveaux cas de suspension du droit de vote à titre de sanction sont prévus pour les sociétés par actions non cotées :
- jusqu’à régularisation de l’attribution des droits de vote des actions ou coupure d’actions émises en violation des dispositions relatives à la constitution de la société sans offre au public,
- en cas de méconnaissance des règles sur les augmentations de capital.
Renforcement de l’obligation d’établissement d’un procès-verbal de l’assemblée générale des actionnaires.
L’obligation d’établir un procès-verbal dans toute assemblée générale de SA résulte désormais d’une disposition spécifique insérée dans celles propres aux sociétés anonymes, afin de rehausser le statut juridique de l’assemblée des actionnaires. En outre, les pouvoirs donnés à chaque mandataire doivent être désormais annexés à la feuille de présence. Le manquement à ces obligations est sanctionné par une nullité facultative.
II- Apports et opérations sur capital ou titres de capital
1) Régime des apports en société
Modalités de désignation du commissaire aux apports dans les sociétés par actions et à responsabilité limitée.
Le commissaire aux apports peut désormais être désigné à l’unanimité des associés en cas d’apport en nature ou de souscription d’avantages particuliers lors de la constitution ou de l’augmentation de capital d’une société par actions. Antérieurement, seule la nomination par voie judiciaire s’imposait.
En cas d’augmentation de capital dans une SARL, la désignation du commissaire aux apports peut être faite à l’unanimité des associés ou à défaut d’unanimité, la demande de désignation en justice pourra également être faîte par un simple associé indépendamment du gérant.
Cas de dispense de désignation d’un commissaire aux apports
Les apports de valeurs mobilières donnant accès au capital, d’instruments du marché monétaire évaluées suivant des règles particulières, des éléments d’actif ayant été évalués, à l’occasion d’un précédent apport, par un commissaire aux apports six mois au plus avant la réalisation effective du nouvel apport, sont dispensés de l’évaluation du commissaire aux apports, si les fondateurs, en cas de constitution, le conseil d’administration ou le directoire dans une SA, le président d’une SAS, en cas d’augmentation du capital, le décident.
Une révision de l’évaluation des valeurs mobilières et des instruments du marché monétaire est prévue en cas de circonstances exceptionnelles pouvant en modifier sensiblement la valeur à la date de la réalisation effective de l’apport. Il en sera de même pour les autres éléments d’actif faisant l’objet d’un réapport lorsque leur juste valeur aura été modifiée sensiblement par des circonstances nouvelles.
Apports partiels d’actifs
La loi nouvelle offre maintenant la possibilité de soumettre au régime des scissions, les apports partiels d’actifs réalisés entre toutes les sociétés commerciales sans les limiter aux seules SARL et SA.
Augmentation de capital
Des modifications à la marge sont apportés en matière d’augmentation de capital au profit des salariés dans les SA et en matière d’augmentation de capital dans une SARL (libération du capital calquée sur celle des augmentations de capital dans les SA).
2) Régime des cessions de titres
Les associés des SEL peuvent désormais insérer dans les statuts une clause qui, par exception à l’article 1843-4 du Code civil, fixe les principes et les modalités applicables à la détermination de la valeur des parts sociales en cas de cession ou de rachat de celle-ci par la société. Cette clause doit être adoptée à l’unanimité.
La loi affirme désormais expressément que, sauf disposition contraire du décret particulier à chaque profession, la valeur des parts des SEL doit prendre en considération une valeur représentative de la clientèle civile. Les statuts peuvent toutefois exclure cette valeur de la valorisation des parts sociales, à l’unanimité des associés.
3) Information des tiers
Dispense de dépôt de rapport de gestion
Les sociétés en nom collectif dont les associés sont des SARL ou des sociétés par actions, les SARL, les sociétés par actions non cotées sont désormais dispensées de déposer au greffe du tribunal de commerce, leur rapport de gestion. Toutefois le rapport de gestion doit être tenu à la disposition de toute personne qui en fera la demande dans des conditions à fixer par voie règlementaire, y compris l’administration fiscale.
Dépôt des autres documents
Les comptes annuels et les rapports annuels doivent être désormais déposés en un seul exemplaire au greffe.
Lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique, le délai de dépôt est porté d’un à deux mois.
Faute de dépôt des comptes annuels dans les délais, le greffier doit désormais en informer le président du tribunal de commerce pour qu’il puisse mettre en œuvre la procédure d’injonction.
Dispense de comptes consolidés.
Sont dispensés d’établir des comptes consolidés, les groupes d’importance négligeable.
4) Création d’un fichier national des interdits de gérer
Il a été créé un fichier national automatisé des interdits de gérer qui sera mis en œuvre et tenu par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. Son accès sera restreint (greffiers des tribunaux de commerce, magistrats de l’ordre judiciaire dans le cadre de leur mission, représentants de l’administration dans le cadre de leur mission de lutte contre la fraude).
5) Sanctions
La loi Warsmann II poursuit un objectif de dépénalisation commencé depuis la loi NRE du 15 mai 2001 (suppression des peines d’emprisonnement et rehaussement des peines d’amendes) avec un remplacement des sanctions pénales par des cas de nullité.
Lire notre actualité sur la prise en compte de l'environnement et du développement durabledans le rapport annuel de gestion des sociétés par actions (loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite Grenelle II). Voir aussi notre article sur les précisions apportées par le décret du 24 avril 2012
Voir aussi notre actualité relative à l'augmentation frauduleuse du capital (arrêt de la Cour de Cassation du 16 avril 2013)